Tout au long des deux derniers siècles,
Landrecies a tâché de prendre enfin un peu de recul
par rapport à son identité de ville militaire. Elle
sera malheureusement souvent rattrapée par son passé...
L'histoire des sièges de Landrecies
ne s'arrête pas avec 1794 et l'occupation autrichienne :
la ville devra encore faire face à quatre invasions étrangères
jusqu'à aujourd'hui.
La première a lieu en 1815,
alors que la coalition des Etats européens arrive à
bout de Napoléon. La défaite de l'empereur se solde
en effet par une occupation du territoire français. A Landrecies,
ce sont les Prussiens tout d'abord qui sont en charge de l'administration
de la ville. La sauvagerie impitoyable des occupants est restée
dans toutes les mémoires : destructions, exécutions
sommaires des suspects... Heureusement les Prussiens laissent
assez vite la place à une garnison russe, dont on garde
un meilleur souvenir.
Après cet épisode tragique,
Landrecies consacre le XIXème siècle à sortir
un peu de son carcan militaire, notamment en améliorant
les voies de communication. La Sambre est jugée peu navigable
pour les navires modernes, plus gros qu'autrefois : on décide
donc de canaliser ou de dévier par endroits la rivière
en amont et en aval, afin de faciliter l'accès à
l'Oise. Cette opération d'importance s'étend de
1826 à 1839, et c'est de cette époque que date la
distinction entre le "canal"
et ce qui reste de la "vieille Sambre".
En 1855, c'est un nouvel espoir d'ouverture
pour Landrecies puisque la nouvelle ligne de chemin de fer entre
Paris, Bruxelles et Amsterdam passe par la petite ville. Une
gare est construite au-delà des remparts de la Ville
basse et n'a pas changé d'emplacement depuis.
La guerre franco-allemande de 1870-71,
pourtant, rappelle douloureusement à Landrecies son rôle
de place forte. En 1871, elle est encerclée par les troupes
de Bismarck : le dernier siège de la ville pouvait commencer.
Après quelques bombardements, la ville se rend et subit
l'occupation allemande pendant plusieurs mois, comme d'ailleurs
une bonne partie du reste de la France. Cependant les destructions
de 1871 ne sont pas excessives.
La fin du XIXème siècle,
c'est aussi la grande époque de la seconde révolution
industrielle. Les Landreciens sentent de plus en plus à
quel point leurs remparts sont un obstacle au développement
économique. C'est pourquoi ils ne s'opposent pas trop à
la "loi de démantèlement" signée
en 1894 par le gouvernement : comme son nom l'indique, cette loi
prévoit d'abattre les remparts de la ville. Ce qui sera
fait de 1895 à 1899. Landrecies avait cessé d'être
une place forte.
Certains pensent qu'en perdant ses
remparts, Landrecies aurait perdu son âme. Sur le moment,
pourtant, le démantèlement entraîne nombre
d'innovations : création de nouvelles artères à
l'ancien emplacement des remparts (comme le Bd des Résistants
près du lycée, le Bd André Bonnaire le long
du centre socio-culturel...), ce qui
aère agréablement une cité autrefois renfermée
sur elle-même. Sans oublier la création de nouveaux
quartiers résidentiels ou industriels au-delà des
anciennes limites de Landrecies.
En fait, si la ville a pu perdre son
âme, c'est bien plutôt à cause des immenses
destructions subies pendant la première guerre mondiale.
Cette dernière avait pourtant commencé héroïquement
pour les Landreciens : les 25 et 26 août 1914, la bataille
de Landrecies permettait aux troupes anglaises du général
French d'échapper à un encerclement par l'ennemi
et de sauver leur peau. Les Allemands, une fois la ville occupée
le 26, firent payer cher aux Landreciens cet acte de patriotisme
: à l'instar de leurs ancêtres prussiens de 1815,
les destructions et exécutions sommaires allèrent
bon train.
Début novembre 1918, les Allemands
savent la défaite toute proche : les troupes anglaises
du général Sir Ronald Charles progressent inexorablement
vers Landrecies. En désespoir de cause, ils pointent leurs
canons vers la Ville haute et anéantissent le centre. Tout
un patrimoine architectural (dont l'ancien
hôtel de ville) est perdu à jamais, sans parler
des victimes. Le 4 novembre, Sir Ronald Charles, au prix de lourdes
pertes, délivre des Landreciens reconnaissants (une
plaque commémorative est érigée) mais
traumatisés. La croix de guerre de la première guerre
mondiale sera décernée à la commune.
Landrecies, malgré tant de destructions
antérieures, ne se relèvera jamais vraiment de celle
de 1918, au sens où elle peine par la suite à se
refaire une identité. Ce qui ne l'empêchera pas de
devenir pendant la seconde guerre mondiale le centre principal
de la résistance dans la région d'Avesnes.
La ville, en effet, prise par les troupes
de Rommel le 17 mai 1940, avait un sérieux compte à
régler avec les Allemands (cf 1815, 1871, 1914-18). Les
résistants seront donc particulièrement actifs dans
la commune, de même que la répression en retour.
On se souvient notamment de la dramatique histoire des époux
Godart. Henri et Hermance Godart habitaient une ferme au hameau
d'Happegarbes : soupçonnés (sans doute à
juste titre) d'actes de résistance, Henri fut fusillé
dans sa ferme le
8 janvier 1944 et Hermance mourut en déportation... Aujourd'hui,
une place de Landrecies
porte leur nom, et un
mémorial, dédié à eux ainsi qu'à
tous les autres résistants landreciens, fut érigé
en bordure de la Grand'Rue.
Landrecies fut libérée
le 2 septembre 1944 par les Américains. La croix de la
guerre de la seconde guerre mondiale lui sera aussi décernée.
La ville compte donc en tout trois décorations.
Pour un tableau contemporain de Landrecies,
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